Au fil du temps

1984, c'est has been

Quartidi 4 Messidor CCXXVI
(vendredi 22 juin 2018)

 

Fan de science-fiction, j'ai rêvé plus jeune à un monde futur simplifié où le robot et les machines seraient nos amis et nous rendrait la vie facile. Ça y est, on y est. Les assistants vocaux, majordomes électroniques de nos objets connectés, arrivent chez nous. Une pub télé pour l'appareil conçu par Amazon montre une famille heureuse comme on en a plus vu depuis les réclames 50's de l'American Way of Life. Une jeune ado lesbienne n'ose pas avouer à ses parents qu'elle aime les filles. Grâce à l'assistant vocal de la maison, elle fait son coming-out en chanson dans la joie et la bonne humeur. C'est formidable. Et pourquoi pas. Ce que la pub ne dit pas, c'est que, sous couvert de nous aider et mieux nous servir, Amazon (mais c'est pareil avec Google, Apple et tous les autres à venir) enregistrent nos habitudes, nos faits et gestes, nos inclinations et dressent de nous un portrait-robot au petit poil. À la longue ils nous connaîtront mieux que nous-mêmes car ils enregistrent et analysent nos réflexes inconscients.
Cette année sort une nouvelle traduction de 1984. On peut penser que l'éditeur, alarmé par les dérives sécuritaires et la haute surveillance des populations, redonne un coup de projecteur sur le livre de George Orwell pour nous inciter à la méfiance. Je crois que personne n'aime l'intrusion d'une politique d'état dans la sphère privée. La grande différence entre le monde orwellien et les sympathiques espions maisons d'Amazon et compagnie, c'est que le premier est imposé de force par une dictature ; les seconds sont mis en vente et achetés librement. C'est grave qu'un état s'immisce trop loin dans nos vies ; c'est cool de les livrer à des sociétés privées commerciales.
Orwell n'avait pas imaginé cela : Big Brother serait un choix librement consenti par les populations.
Il y a deux livres emblématiques d'anticipation, annonciateurs du monde d'aujourd'hui. Ils n'ont pas été écrits par des auteurs de SF spécialisés, mais par des écrivains philosophes. George Orwell pour 1984 (1948) et Haldous Huxley pour Le meilleur des mondes (1932). Les deux livres semblent assez éloignés l'un de l'autre dans leurs visions respectives du futur. Il est amusant ou glaçant, c'est selon, de constater que le XXIème siècle les faits se rejoindre. Je ne vais pas vous en faire une étude approfondie, je n'en ai pas le temps et ça risque de vous barber. Lisez-les ou croyez-moi sur parole.
Vous pouvez aussi vous faire des sueurs froides quant au futur immédiat à la lecture de Black-out de Marc Elsberg ou en regardant l'excellente série Black Mirror.
Et n'oubliez pas, tandis que vous parcourez mes lignes, Internet is watching you !