Au fil du temps

Charlie Hebdo

Septidi 27 Nivôse CCXXIII
(jeudi 15 janvier 2015)

 

J'ai commencé à lire Charlie Hebdo lorsqu'il reparut en 1992, de manière décousue puis de plus en plus régulièrement. Je l'achetais en kiosque ou dans les gares quand j'étais en tournée. Il y a un bail, j'ai fini par m'y abonner. Les abonnés sont importants pour une revue. Je lis Charlie de bout en bout. J'y trouve mon compte de déconnade, mais aussi d'articles, de reportages et de chroniques des plus intéressants. Charlie Hebdo n'est pas qu'une tribune d'excellents dessinateurs de presse comme on l'entend dire de façon réductrice. C'est un très bon journal fort bien écrit. Libre et sans pub.
On a beaucoup parlé des disparus, assassinés. À jamais irremplaçables. Ceux qui restent le sont tout autant. J'espère qu'ils réussiront à continuer le canard. Sinon que leur dire ? De simples journalistes, ils sont devenus à leurs corps défendant les symboles d'une nation.
C'est du lourd, du bronze dont on fait les statues.
Charlie Hebdo, symbole de l'unité nationale, qui l'eut cru !

 

 

Ce soir de novembre dernier, on était une sacrée tablée chez Patrick Pelloux à s'en mettre plein la lampe en s'esclaffant comme des baleines. Une bande de joyeux drilles en tous genres. Charb n'arrêtait pas de dessiner sur la nappe en papier. À la fin du dîner, Pelloux me dit : « Tu veux la nappe ? » Je réponds : « Oui, mais je veux une dédicace, sinon ça vaut rien ! » J'étais pompette. Charb écrit alors : À Kent qui chante bien en français, mais que Elvis, c'est du caca ! Avec Pelloux, on avait tenté en vain durant la soirée de l'initier à Presley. C'est raté maintenant.

Les premiers mots qui me sont venus à l'esprit, lundi 12 janvier après les jours d'effroi et un dimanche miraculeux, c'est « la vie reprend ». Comme pour en exclure un moment qui n'en ferait pas partie. C'est con. Le temps s'est gelé pour beaucoup d'entre nous, mais la Terre a continué de tourner avec ses guerres et ses attentats, ailleurs, dans d'autres contrées. C'est le lot quotidien de populations entières qui ne l'ont jamais voulu. Comme nous.

Ici la vie reprend, mais n'oublions pas, durant les soldes et après, que le bonheur et la liberté sont des denrées rares et fragiles.


PS : l'éditeur de films et de DVD Malavida fait un travail formidable sur le cinéma d'auteur européen. Dans un fort beau packaging, on peut découvrir ou revoir notamment les films des réalisateurs marquants de la nouvelle vague tchèque. "Les petites marguerites" de Vera Chytilova et "L'incinérateur de cadavres" de Juraj Herz sont des petits bijoux.
Voici le lien : Malavida Films